Les négociations relatives à la modernisation du TCE se poursuivent avec deux cycles de réunions estivales, alors que l’opposition de la société civile croît
Depuis notre dernier rapport sur le processus, deux cycles virtuels de négociation sur la modernisation du TCE ont EU lieu, alors même que l’opposition de la société civile à l’accord, notamment au sein de l’UE, s’accroît.
Le cinquième cycle a eu lieu en juin 2021. D’après une déclaration publique émise par le groupe de travail sur la modernisation, les sujets abordés lors de cette réunion incluaient la définition du transit ; les questions liées à la RSE et au développement durable ; le règlement des différends, mettant l’accent que la prévention et sur les recours abusifs ; les garanties du paiement des frais ; le financement par des tiers (FPT) et l’évaluation des dommages ; et, pour finir, la mesure dans laquelle le règlement de la CNUDCI sur la transparence dans le RDIE devrait être adopté.
Le sixième cycle de discussions s’est tenu en juillet 2021, et a couvert les questions préinvestissements, l’organisation régionale d’intégration économique, les dispositions obsolètes, la définition d’activité économique et d’autres questions liées à la protection de l’investissement. S’agissant de ces dernières, la communication publique émise après les discussions note que la réunion a abordé les définitions de l’investissement et de l’investisseur, l’expropriation indirecte, ainsi que le refus des avantages.
D’après une déclaration émise par la CE, le sixième cycle a réalisé « des progrès substantiels », notamment s’agissant de la protection de l’investissement. Cependant, la pression au sein de l’Europe en faveur du retrait du TCE continue de monter ; par exemple, lorsque la Slovénie a assumé la présidence du Conseil de l’Europe en juillet, les ONG slovènes auraient appelé le gouvernement a pousser, dans le cadre des discussions, l’idée du retrait total du TCE. En préparation de la COP26, prévue pour novembre 2021, les organisations européennes de la société civile ont appelé les dirigeants européens à utiliser la conférence comme date limite pour le retrait du traité.
Entre temps, dans une décision préjudicielle du 2 septembre, la CJUE était d’avis que la disposition sur le règlement des différends investisseur-État (RDIE) du TCE était contraire au droit européen. D’après la Cour, l’UE n’avait pas la compétence pour soustraire au système juridictionnel de l’UE le règlement d’un différend entre un investisseur d’un État membre de l’UE et un autre État membre de l’UE. Elle indique qu’un tel fait impliquerait de remettre en cause « la préservation de l’autonomie et du caractère propre du droit institué par les traités [européens] » (para. 63). Bien que le TCE soit un accord multilatéral qui créé également des relations avec les États non membres de l’UE, cela s’oppose à ce que « le TCE puisse imposer les mêmes obligations aux États membres entre eux » (para. 65). Le TCE doit donc être interprété comme ne pouvant s’appliquer à ces différends.
Adoptant ce point de vue, la Cour a confirmé que son raisonnement dans la décision phare sur Achmea s’appliquait également au TCE. Dans Achmea, la CJUE concluait que les dispositions RDIE des TBI intra-UE étaient incompatibles avec le droit de l’UE, et incitait les États membres à mettre un terme à leur TBI. Si cet avis était un obiter dictum et n’est pas juridiquement contraignant, il est un fort indicateur que la Cour déterminera que le RDIE au titre du TCE est incompatible avec le droit européen dans l’une des deux décisions à paraître en 2022 – une demande d’avis du gouvernement belge et une demande de décision préjudicielle de la Cour d’appel de Svea (Suède). L’avis soulève également une autre question : comment les tribunaux arbitraux et les cours d’application, notamment aux États-Unis, réagiront-ils lorsqu’il leur sera demandé de trancher un différend intra-UE ?