Un législateur de l’UE souhaite que la taxe carbone aux frontières couvre davantage de produits et entre en vigueur plus rapidement
Mohammed Chahim, le législateur en charge des travaux du Parlement européen sur une taxe carbone aux frontières de l’UE a présenté un projet de rapport portant sur la proposition législative visant à établir un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. Ce rapport sera examiné par la commission de l’environnement du Parlement en février.
Le législateur en charge des travaux du Parlement européen sur une taxe carbone aux frontières de l’UE a proposé d’élargir les produits couverts, d’accélérer son entrée en vigueur, et de réduire la période de transition allouée aux secteurs présentant un risque de « fuite de carbone », c’est-à-dire les industries lourdes qui fuient l’Europe à l’heure où le bloc décarbonise, pour s’installer dans des pays aux normes environnementales moindres. Mohammed Chahim plaide également en faveur de meilleurs financements climatiques pour les pays pauvres affectés par la taxe envisagée sur les biens intensifs en carbone importés dans l’UE.
Eurodéputé néerlandais de centre-gauche, M. Chahim a présenté un projet de rapport au Parlement le 5 janvier. Le document, daté du 21 décembre 2021, s’inscrit en réponse à la Commission européenne, qui propose que les partenaires commerciaux payent un prix carbone équivalent à celui payé par les entreprises européennes. Il sera examiné en débat par le Parlement européen le mois prochain, dans le cadre du processus de trialogue entre la Commission, le Parlement, et le Conseil, en vue de la finalisation de la législation correspondante.
Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) proposé devrait imposer des taxes sur certaines importations représentant les émissions rejetées lors de la fabrication de ces produits dans le pays d’exportation. Il vise à protéger les fabricants locaux en obligeant les importateurs à payer pour les émissions intégrées dans certains produits.
« Aujourd’hui nous avons présenté notre projet de rapport sur la proposition de loi portant création d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières aux rapporteurs parallèles », a indiqué M. Chahim sur Twitter le 5 janvier. « La proposition de la Commission est un excellent point de départ, mais je pense qu’elle peut être améliorée dans plusieurs domaines ».
Voici ses principales suggestions : élargir le MACF pour inclure les produits chimiques organiques, l’hydrogène et les polymères ; élargir la couverture aux émissions indirectes au terme de la période de transition ; raccourcir la période de transition de 3 à 2 ans, afin d’accélérer la mise en place du mécanisme ; accélérer la suppression des quotas gratuits ; établir un système centralisé auprès de l’autorité en charge de MACF de l’UE, plutôt qu’un système décentralisé tel qu’envisagé par la Commission ; et octroyer des exemptions aux seuls partenaires commerciaux dotés de politiques explicites de tarification carbone en vigueur.
Gérer les nations à faible revenu et les exemptions
La Commission souhaite que le mécanisme entre en vigueur d’ici à 2023, accompagné d’une période de transition jusqu’en 2025. Au cours de cette période, les importateurs seraient tenus de respecter les obligations administratives et de notification des émissions résultant des biens qu’ils importent. Les produits couverts par le MACF – qui sera éventuellement étendu au cours d’un examen prévu avant la fin de la période de transition – seraient assujettis à la taxe carbone dès 2026. Les nouvelles règles concerneront les producteurs et fournisseurs non européens de biens, ainsi que les importateurs et les secteurs européens en aval.
Les produits couverts au titre du plan de la Commission sont l’acier, l’aluminium, le ciment, l’électricité, les engrais et le fer. Tim Gore, qui gère le programme sur le climat et l’économie circulaire de l’Institut pour une politique européenne de l’environnement, prévoit que le MACF générera 9,1 milliards € (10,3 milliards USD) par an d’ici à 2030, dont 2,1 milliards perçus directement à la frontière. Le reste viendra de l’élimination progressive des quotas gratuits d’émissions accordés aux producteurs de l’UE dans ces secteurs. Au titre de la proposition de Mohammed Chahim, les quotas gratuits seraient éliminés avant 2029, soit 8 ans plus tôt que ce que la Commission recommande.
Au titre de la proposition de la Commission, les seules exemptions à la taxe concerneraient les importations en provenance de pays appliquant un système d’échange d’émissions partiellement ou complètement lié au système européen. La taxe serait ajustée en fonction du prix carbone payé dans le pays d’origine. La proposition a été critiquée au motif qu’elle ne soutient pas une transition juste pour les pays à faible revenu qui dépendent fortement des échanges avec l’UE et ne sont guère responsables du changement climatique. Le vice-président de la Commission, Frans Timmermans, a indiqué en octobre qu’il devait y avoir « une transition juste, ou alors il n’y aura pas de transition ».
La proposition de M. Chahim n’exempterait pas non plus les pays les moins avancés. Mais il suggère d’allouer un financement climatique « au moins équivalent à la valeur financière » des recettes générées par les ajustements carbone à la frontière en soutien de la décarbonisation des industries lourdes de ces pays. Cela permettrait ainsi de réduire le taux de la taxe carbone dans le futur. Selon Climate Home, M. Chahim aurait indiqué qu’il était nécessaire de soutenir les pays les moins avancés pour que la taxe soit conforme aux règles de l’Organisation mondiale du commerce.
La commission de l’environnement du Parlement examinera le rapport de M. Chahim et tout amendement présenté par ses membres. Le vote du comité est prévu pour le 28 février.
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